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Je ne suis pas une vielle chaussette !

Dernière mise à jour : 1 oct. 2023

« Et là, pan ! Il l’a laissée tomber comme une vieille chaussette ! ». Mon interlocutrice décrivait avec force gesticulations et onomatopées le destin un peu tragique d’une de ses connaissances qui, alors qu’elle comptait sur l’aide de quelqu’un, s’était vue brutalement privée du soutien promis. Cette connaissance s’était sentie trahie, insultée, outrée et avait conçu pour « le traitre » une colère noire et une rancœur tenace.



D’abord amusée par la narration haute en couleur de la déconvenue de cette personne qui m’était parfaitement inconnue, je suis rentrée chez moi avec une étrange impression au creux du ventre. « Avant », j’aurais fait peu cas de ce ressenti. Je l’aurais ignoré pour tout dire. Mais depuis que je fais connaissance avec moi-même, j’ai observé ce ressenti. C’était une sorte de malaise insidieux, que je localisais sous mon nombril. En l’observant bien, il remontait un peu vers la gorge et me donnait un très vague goût métallique dans la bouche. Et clairement ces sensations physiques étaient le fruit d’émotions qui se manifestaient ainsi.


Nos émotions se manifestent toujours physiquement. Quand ce sont des émotions positives, ce n’est pas difficile de les accueillir (encore que). On aime sentir son cœur battre parce qu’on éprouve de l’amour pour quelqu’un, on aime sentir le rire monter et déborder avec la joie qui nous submerge. Mais ça devient plus compliqué quand les émotions sont négatives. La colère qui nous fait fulminer, la peur qui nous coupe les jambes, la honte qui nous fait rougir, la tristesse qui nous fait pleurer.


Les émotions sont un langage. Elles nous disent des choses. La peur me dit que je tiens à quelque chose ou à quelqu’un. L’angoisse et l’anxiété me disent que malgré les apparences j’aime la vie. Ce que je ressentais avait donc un message pour moi : mes émotions voulaient me parler.


Il fut un temps où je craignais beaucoup mes émotions. Elles me faisaient terriblement peur et je tentais toujours de les contenir. Ce n’était pas une bonne idée car, lorsque je ne pouvais plus les maitriser, elles explosaient en crises de larmes et en désespoirs profonds qui ternissaient encore plus ma vie et me donnaient l’impression que ces émotions étaient VRAIMENT dangereuses. Depuis, j’ai appris qu’il n’en était rien mais, malgré tout, je suis toujours précautionneuse lorsque je les ressens en moi.


Je me suis donc approchée tout doucement de ce ressenti et l’ai observé avec beaucoup de curiosité. Petit à petit j’ai distingué de la colère, de la déception, de la honte et de la tristesse. Mais quel était le lien avec l’histoire que l’on m’avait racontée un peu plus tôt ? Franchement, je restais perplexe.


Il a fallu quelques jours avant que les pièces du puzzle ne s’emboitent. D’un seul coup, j’ai réalisé que je m’étais laissée tomber comme une vieille chaussette et ce, à de nombreuses reprises ! Combien de fois m’étais-je promis que j’allais faire ci ou ça pour moi-même et que je n’en avais rien fait ? Combien de fois m’étais-je dit que j’allais prendre du temps pour moi et que je me retrouvais à le donner à d’autres alors que je n’en avais même pas envie ? Combien de fois avais-je pris de bonnes résolutions afin d’améliorer certains pans de ma vie et que je ne les avais pas tenues ? Et généralement, toutes ces démissions s’accompagnaient d’une sentence désabusée en forme d’excuse : « De toute manière, je n’ai aucune volonté… ».


Alors oui, je pouvais vraiment être en colère contre moi-même, être déçue de moi. Je ressentais de la honte de m’être ainsi laissée tomber à de trop nombreuses reprises et je ne pouvais qu’en être très triste.


Maintenant que j’ai acquis certaines connaissances et quelques outils, je suis en mesure de reconnaitre là le travail de mon cerveau. Car c’est un organe extrêmement puissant qui cherche à nous protéger d’abord et avant tout, même si cela va à l’encontre de nos projets. Il faut lui en être reconnaissant.


Quand mon cerveau m’enjoint de renoncer à mes promesses envers moi-même, il vise l’économie. Il est un des organes qui consomment le plus d’énergie dans le corps et il sait qu’en cas de danger, il devra en mobiliser encore plus pour nous inciter à nous battre, à fuir ou à nous cacher. Il est important que les réserves ne soient pas entamées par de nouveaux schémas neuronaux à mettre en place pour développer de nouvelles habitudes. Tout cela est lié à la partie archaïque de notre cerveau, mais en même temps, ce même cerveau nous propose aussi la solution pour avancer et mettre en place ce que nous souhaitons. C’est son cortex préfrontal qui nous permet d’anticiper et de planifier. Nous sommes l’espèce sur terre chez qui il est le plus développé. Nous pouvons prévoir, planifier et ne pas nous donner d’excuses pour aller à l’encontre de cette planification. Ce que ça nous coûte ? Juste un peu d’inconfort, le temps de prouver à la partie archaïque de notre cerveau que nous ne sommes pas en danger et d’établir de nouvelles habitudes qui le rassureront.


Maintenant, j’ai appris. Quand mon cerveau m’incite à ignorer les engagements que j’ai pris envers moi-même, je lui dis « merci mais non merci ! ». Je sais qu’il fait (bien) son travail. Ainsi j’ai pu constater que ma relation à moi-même s’était améliorée. Je commence à être sûre de pouvoir compter sur moi. Je ne me sers plus d’excuses bidons. Et c’est incroyable la différence que cela fait ! J’entretiens une relation bien plus apaisée avec moi-même maintenant que je peux compter sur moi. Bien sûr, ça ne marche pas à tous les coups et il m’arrive de retomber dans de vieux travers. Mais ils deviennent plus rares.


Alors non, décidément non, je ne suis pas une vieille chaussette !

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